LES AVENTURES PHILOSOPHIQUES DE L'EROTISME
"Réféchir, penser, approfondir peut rendre aussi heureux que l'érotime et la volupté"
Le Roman que Sophie CHAUVEAU consacre à Diderot, son "génie débraillé" est passionnant parce qu'elle est passionnée ! Amoureuse de son "Sujet", elle ne cesse de le découvrir et de le caresser. Dans tous les Sens ! Et c'est magnifique, un Philosophe qui jouit !
Je ne devrais pas aimer Diderot, moi qui me réclame des Dissidents et proclame la suprématie de l'Esprit. Qu'ai-je donc à comploter avec ce fieffé Matérialiste, si brillant élève des Jésuites et des Jansénistes ?
Adolescent, je me suis, comme l'Auteur de cette "hétérofiction", identifié aux deux personnages du "Neveu de Rameau". Le "grand air" de la Bohème, en toute occasion, ça ne pouvait -ça ne peut- que me séduire ! Ce n'est pas moi qui vais rêver des ridicules atours des Bourgeois. Sont-ils plus avancés que moi? Ne figurent-ils pas, comme moi, sur le carnet de Bal de la Mort ? Se feront-ils enterrer avec une Rolex en guise de chapelet ? Leur squelette, au terme de leur démocratique décomposition, sera-t-il plus clinquant que le mien ?
Ensuite, il me plait de mettre mes pas dans ceux de René Crevel, cet Ange Communiste du Surréalisme qui mit fin, brutalement, à ses "contradictions dialectiques". Un Etre aussi beau, si épris de Diderot, cela mérite bien que l'on s'arrête et que l'on observe.
Très certainement, Diderot fut, à l'époque et dans le milieu où il vécut, un Dissident. A l'époque, on disait encore "philosophe". Il s'est opposé au tout puissant Clergé. Soucieux d'éclairer la -petite- partie des classes dominées qui savait lire, il lui confia toutes les Connaissances terrestres disponibles sous la forme de cette immense Encyclopédie qu'il rédigea avec ses complices. Il n'y a guère que Google et Wikipedia pour faire mieux, beaucoup plus tard ! Il a mis en cause le Colonialisme et l'Esclavage, ces fléaux qui nous font encore tant de mal.
De ses Lumières, il a ouvert le chemin d'une Révolution qui, malgré la Terreur, cette "maladie infantile" , ne s'est pas révélée dénuée de vertus dont nous bénéficions toujours.
A mon avis, cette subversion matérialiste tombait à point nommé et elle n'ignorait pas certaines valeurs que les Evangiles, ce scandaleux Roman de l'Incarnation, avaient, au terme de l'Antiquité, proposés. Les ennemis apostoliques des Philosophes les traitaient de Juifs. C'était bien dit: Juifs comme Jésus, ils n'avaient jamais perdu de vue, dans leur inconscience même, l'ESPRIT.
Enfin, last but not least !, Diderot me séduit parce que ,comme moi, il était terriblement gourmand. Cet amour de la Vie, qui me fit aussi rencontrer Giono, je l'ai, chevillé au corps ! Mais dans mon appréhension du Monde, plus Surréaliste que chrétienne, la Chair et l'Esprit n'entrent pas en conflit. Tout au contraire: dans mon Tao personnel, ils s'érotisent l'un l'autre pour le plus grand Bien de ce Poème qu'est notre existence toute entière.
Malgré ma grande estime de Desnos et Breton, je garde toujours une place dans mon âme aux étranges "passants" du "Grand Jeu". Sans doute ont-ils mal "tourné" mais, précurseurs, ils nous ont ouvert des routes vers les "autres mondes" et la Transcendance qu'ils proclament tous.
Je sens que je m'éloigne déjà du "moment-Diderot". Dommage. Je n'ai retenu qu'une épaule féminine, dénudée, peut-être illustrée par une toile de Fragonard, et ce fruit qui, dans le Roman, de n'être pas totalement croqué, laisse encore le Désir, si naturel, et donc si divin, de toute saveur.
Dominique Gabriel NOURRY
A lire d'urgence, de Sophie CHAUVEAU, aux Editions Télémaque, l'appétissant roman : "DIDEROT, le génie débraillé" ( 2 tomes à dévorer sans interruption !)