LETTRE VOLEE / LETTRE EPERDUE
Bruit pluie nuit
et le grand étalage des îles
sur le clavier des nuits
je n' ai jamais longé que Ta Vie
lorsqu' elle s' enfonçait vers ces vastes demeures
dont s' éprend le Temps
ne me sois pas fidèle
ne sois fidèle qu' à ton Désir
c' est ainsi que tu me rencontreras
sais-tu combien la mort
a troublé nos mouvances
nous qui de nous-mêmes ne savions
que notre envie de naître
et de surgir dans la lumière
au-dessus des ondes noires
où se confondirent nos regards
ô ma chérie
que nous caresse
le geste du départ
toujours désormais
l' absence aura la forme
de ce corps
que j' aimais
trop
aux longs plis d' espace se confinent
nos rires que crispèrent
les raides raisons de l' Aube
si ce n' est Adieu
c' est Bonjour
que je te murmure
au seuil des calanques
où dorment les dauphins
comme eux d' avoir trop aimé sauter
ces lignes d' horizon
qui ne concernent jamais
les vivants
je m' évanouirai dans le soleil
mon silence charmant
où dans ce sommeil
que hantent les Sylphides
trop souvent
je me suis livré
au prisme inquiétant
des mots que n' habite plus
l' unique merveille
de la Présence
....et je ne regrette rien....
je me perdrai je me perdrai encore
car je sais l' illusion des sens
que ne confond pas le vent
de l' immédiat
ge gis déjà
près de ma main qui flirte
avec les touches blanches
du jardin de l' ombre
et je murmure
ne vous inquiétez pas
il neige sur les marbres
des cygnes harmonieux
que ne troubleront plus jamais
les reflets
leur sillage s' écrit
comme s' écrivent les songes
en ces grands crépuscules défenestrés
que seule possède la Voix
le long des quais de nos regards
passent ces longs naufrages
dont témoigneront
entrefilets de sang
les gazettes de l' Iréel
est-ce la mer à boire
ce long suicide
comme un orgasme
dabs le fouillis des iris
je n' appelle plus
je glisse sur ces vagues nouvelles
qui émergent du ciel
m' entraînent vers le Présent
cristal des larmes encore
bu jusqu' à l' excès du Désir
dans la tendre floraison
dont s' étoilent mes veines
que le porte à ses lèvres
celle dont la Vie déluge
me surprit un soir de mai
et que pour tant de violence
elle soit remerciée
puisque c' est Elle
ma mort
que je cherchais
dans le regard trouble des passantes
que déjà hantait le Port
puisque la lourde étoffe
du songe
de mes épaules tombe
comme une inutile peau
puisque je ne désire plus vivre
que de la vie
de mes os de mes nerfs de mes viscères
criblé de quarks et de questions et d' angoisse
enfin bien réelle
qui griffe la nuit
de ses ongles d' enfant
et de ses mots inutiles
et de sa dérisoire impatience
mais voilà
vous souriez
de nouveau je ne suis
que ce hasard de synapses
grouillants au bord du gouffre
je ne suis
que l' écume de mon îvresse
et je bouge la tête
comme un Arlequin
qui bave de tendresse
je te donne
je te donne
je te donne
mais qu' a-t-elle à donner
loin des harmonies
loin des enlacements
des sexes
et des dés cliquetant
sur le comptoir
des bars
qu' a-t-elle à donner
tu le sauras plus tard
trop tard
quand seront tombés
avec les feuilles d' automne
les masques
vous souriez
je me tais
je n' ai pas à vous proposer
de clip de la pénombre
de pub pour l' Eternité
de disquette pour le Désir
je n' ai plus que
mes deux mains
posées sur la table
devant moi
comme des étrangères
ce soir
c' est à peine si j' ose
vous regarder
il est possible
que vos yeux
ne me reflètent plus
et que j' aie disparu
bonsoir
douce nuit
mes Ami-e-s
je crois qu' il fait encore froid
dans les rues
de Paris