ODE A CLARA , VENDEUSE CHEZ ZARA
Clara
c'est à toi
que je dédie
ce matin
ce poème
lyrique
irrégulier
mais fidèle
comme mon coeur
s'il m'arrive
de m'introduire
dans ta boutique claire
loup solitaire au milieu des femmes avides
ce n'est pas seulement
pour découvrir
l'élégante Idée
dont vont les passantes
se parer
ce n'est pas seulement
pour caresser froisser lisser
ces étoffes qui vont bientôt
sublimer tous ces corps
dont je ne cesse de rêver
ce n'est passeulement
pour esquisser un pas de danse
sur le rythme du tiroir-caisse
notre instrument
partout vénéré
dans le concert des Nations
Clara c'est un tout autre commerce
que je veux entretenir
avec toi
dans le séminaire
où j'apprends le journalisme
après Marx Deleuze et Badiou
mon Professeur bien aimé
ce voyou
t'a citée
toi la vendeuse de chez Zara
le soir
sous l'oeil torve de Pujadas
sur la table à peine essuyée
malgré le long braiment des enfants
sur tes serviettes en papier
secrètement tu écris
de poèmes Romantiques
et puis tu te mets à lire
dans l'ensommeillement
d'une émission de variétés
depuis que je sais cela
je rêve de t'aborder
pour te poser des questions
pour mieux te connaître
toi que je sens si proche
de moi
mais je n'ose
tant tu parais
fragile
subtile
et délicate
t'entraîner dans une cabine
pour découvrir tes goûts
littéraires
je crois que Coelho
ce cauchemar de nos clercs
souvent t'entraîne
dans son pélérinage
lorsque tun'essaies pas
de caresser
ces écureuils de Central Park
que fait fuir
à la cime des arbres
Alain Robbe-Grillet
personnellement
tu te développes
jour après jour
et malgré tout ce travail harassant
- je voudrais bien les y voir les professeurs-
tu rayonnes
pour les clientes affriolées
et le Poète voyeur
qui ne cesse
de t'admirer
c'est étrange
plus que les sages étudiantes
en jeans corporatistes
dans ta petite robe noire
toute simple
qui magnifie si bien ton corps
tu me bouleverses
comment gardes-tu
dans la fébrilité de l'heure de midi
ce sourire cette grâce cette élégance
et ce sourire
encore
encore
je voudrais t'accrocher
je t'aime pour le poème
que tu es
au coeur de mon quartier
mais pourtant
jene te ferai pas signe
je ne t'adresserai pas ces lignes
tu te soucierais peu des vers
d'un visiteur que tu imagines
peut-être pervers
ni de l'ode
d'un passant
en maraude.
Dominique Gabriel NOURRY