QUE LE SURREALISME TOUJOURS FASSE SCANDALE !!!
Un matin, dans un lycée de banlieue, sous mes yeux, un professeur a ouvert la "malle surréaliste". Etrange cadeau déposé devant la cheminée d'un improbable Noël !
La malle contenait des livres, des objets, des reproductions. Les élèves, en classe de Première, futurs techniciens, ont écarquillé les yeux !
A ma grande surprise, ils ont trouvé choquante cette découverte au fond du coffre des Corsaires !
Cependant que les Parisiens, dans leurs repaires (et leurs repères ! ) protégés se livrent à des divertissements chaque saison plus épicés que leurs palais blasés ne savourent plus, des jeunes gens simples découvrent avec effarement les subversions de Breton, Desnos et leurs amis !
Cela fera lentement -mais sûrement ! - son chemin.
Cela nous entraîne loin du scandale programmé ce soir sur la scène du théâtre du Rond Point avec, en vedette, Dominique de VILLEPIN !
Qu'allais-je faire dans cette galère proposée par Télérama ? , me demanderez- vous.
DU TERRAIN !
J'ai passé tant d'années dans les zones sensibles que je ne sais plus très bien comment se comportent les bipèdes de l'élite !
Ils sont imperturbables et palabrent loin des bienfaits et des dangers de la Planète, la tête coincée dans leur hexagone imperturbable.
Dans le métro, je me souvenais du banquet de Saint Pol ROUX à la Closerie des Lilas, début juillet 1925.
Les Surréalistes, grands admirateurs du Mage de Camaret avaient été conviés.
Si j'en crois le récit de Marc POLIZZOTTI, ils étaient de méchante humeur à cause de cette guerre du Rif qui venait de se déclarer et des propos de PAUL CLAUDEL, ce Poète aussi Chrétien que politicien qui les avait traités de "pédérastes" !
Lorsque RACHILDE, femme de Lettres célèbre, a tenu des propos désobligeants sur les "boches" devant le peintre MAX ERNST, les forces vives se sont déchaînées ! Ce fut un vrai pugilat qui pourrait faire rêver certains de nos jeunes rapeurs !
Comment oublier MICHEL LEIRIS criant "A bas la France ! " et descendant sur le trottoir pour provoquer la foule assemblée !
Evidemment, il fut rossé d'importance avant d'être appréhendé par la Police (qui s'en donna, paraît-il, elle aussi, à coeur joie ! )
Comme ces jeunes gens, en ce temps-là, savaient s'amuser !
Aujourd'hui, j'imagine que l'on peut crier d'une fenêtre "A bas la France !" sans créer d'esclandre.
Si l'on veut faire un véritable scandale -et risquer sa vie, peut-être ! - mieux vaut choisir un pays plus chargé d'affect et de symboles .
L'identité nationale n'a pas disparu malgré toutes les pinces à linge : elle s'est déplacée !
Moi, ça m'est égal : je suis un Breton du Grand Large !
Et je ne consille à personne de se livrer à des expériences aventureuses.
Et pour des raisons de sécurité.
Et pour des raisons d'éthique.
En cette matière, l'imagination suffit !
Mais au Théâtre du Rond (Petit Patapon ! ), ça tourne et ça ronronne mais ça ne fait pas scandale !
Pour être tout à fait honnête, je dois reconnaître que des Dames très bien élevées, munies de barbes et de pancartes, sont montées sur l'estrade et se sont campées quelques instants derrière les orateurs qui ne craignaient visiblement pas d'être violés.
Ils étaient en pays de connaissance : ces dames ont déjà eu leur photo dans le magazine qu'ils (des) servent !
La cheftaine a lu un manifeste avec lequel je suis tout à fait d'accord.
Vive la parité hommes/femmes, PARTOUT !
Tous ensemble, tous ensemble !
Cela me convient tout à fait parce que j'adore regarder les femmes partout où je vais !
" Il ne faut toucher qu'avec les yeux ! " , me disait ma mère.
Je suis scrupuleusement ce conseil.
Mais j'admire !
Il n'y a que les femmes qui me paraissent réelles dans la Société de Spectacle !
La proclamation lue, elles sont descendues dans la salle pour distribuer leurs prospectus.
Lorsque j'ai voulu saisir le précieux texte que brandissait une de ces Amazones, elle s'est jouée de moi comme d'un jeune chat (alors que je suis un vieux matou essoufflé !) et c'est ma voisine qui a bénéficié de l'offrande !
J'ai dû user de mes charmes pour profiter de cette manne.
Les revendications sont justes.
Mais il y a beaucoup plus urgent !
Aujourd'hui, trop de femmes sont violées !
Trop de femmes sont battues par leur compagon : ça se sait un peu.
Beaucoup trop de femmes seules sont battues par leurs enfants, notamment par leurs grands garçons.
Et là, tout le monde détourne la tête !
Il ne faudrait surtout pas remettre en cause les sacro-saints "jeunes"
qui ont tant de problèmes...
qui sont si malheureux...
etc...
Lorsque cette tempête dans un verre d'eau qui ne pansera pas les coups et blessures s'est apaisée, les conférenciers ont repris dans un profond calme leur dialogue.
Il y avait un philosophe.
Deux ou trois écrivains.
Un médecin urgentiste.
Il y avait les spectateurs qui avaient payé 7 ou 10 euros et semblaient satisfaits de leur sort. Il est vrai que, sur la scène, il était souvent question d'un partage du pouvoir.
Et même quand on est un "raté" plein de ressentiment comme moi, ça met du baume au coeur.
Forcément !
DE VILLEPIN a évoqué le silence d'ARTAUD au Vieux Colombier.
C'est un homme cultivé !
Dommage qu'au niveau captation des cris il soit si sélectif !
Si correctement sélectif !
Il a dit aussi qu'il était bon de se remettre en cause .
Bien.
Mais à personne, même pas à un plus vieux, il n'a proposé sa place.
Pourtant, je l'ai toujours senti sur un siège éjectable, cet homme-là !
L'une des Stars a parlé de DADA .
Une autre de DEBORD.
Forcément.
Tout le monde parle de DEBORD.
Le mieux, meintenant, serait de le lire !
Et de le critiquer, ne serait-ce que pour lui être fidèle .
Personne n'a prononcé le nom de BRETON.
Et ça, c'est bon signe !
Signe ascendant !
Signe qu'il se prépare, en son Purgatoire, à ressurgir, lui, le Pape intraitable qui jamais n'a rompu avec FOURIER pour NICOLAS FLAMEL ! (ni le contraire ! )
Alors dans ma "D'ici Dance", forcément infidèle à tous -même à mes Surréalistes bien aimés ! - j'entretiens paisiblement la flamme.
Je sens venir de grands froids.
Glaciaires.
Je crois que nous aurons bientôt besoin de nous réchauffer !
Dominiqu Gabriel NOURRY
MARC POLIZZOTTI :
"ANDRE BRETON "
Biographies NRF Gallimard