SUITE .....
dans la résine de l'espace
le cadavre
résiste
comme si
même
d' être privé
de clarté
donnait
à penser
don facile
futile peut-être
dans le reflet du marbre
qui sait
qui sait la portée d" un cri d' enfant
dans la pleine nuit
qui sait le hurlement d' un chien
que tourmente la lune
qui sait
jusqu' où
peut aller
l' amour d' un homme
pour une femme
lorsque cet homme
n' appartient pas tout à fait
au Temps
lorsque la femme
aimée d' un poète
ne s' appartient plus
tout à fait
mais relève de la voix
qui seule
accode
ou n' accorde pas
la vie
aux errantes solitaires
rien ne se clôt
parce qu' ainsi
le décide
l' instance que je sers
et dont je dépends
rien ne se clôt
sans certaine
inflexion de langue
et de lèvres
que seule détient
ma bouche
et toi tu marches dans les rues de Mantes
comme on marche n' importe où
ne sachant plus que
tu es mon amante
tu es mon amante
au centre de la Terre
fichéeparce qu' ainsi
te délivre
mon désir
mon désir te délivre des besoins
qui trop souventagitent tes pensées
les faisant
comme un écureuil dans sa roue
tourner
tourner
tourner
mon désir te délivre des ténèbres
où to âme
incertaine encore
erre
je suis entre les notes
de ton piano
ce silence
qui d' un rêve soudain
te fait hésiter
je suis l' homme debout sur la route
bien campé sur ses jambes
que ne traversent que
les nuages
et les fantômes
je ne te laisserai pas
sombrer
dans l' illusion
qui si souvent
voile ton regard
ailleurs
il n' est d' ailleurs que dans l' étreinte
qui nous unit
au printemps de la nuit
d' ailleurs
il n'est
que l' enfant de lumière
dont fut mis au monde
une première nuit
le désir de vivre
depuis il cherche ton sein
comme je cherche tes yeux
nous laisseras-tu tous deux
nous perdre en ce bleu
dont le secret
déchire
et toi tu marches dans les rues de Mantes
comme on marche n' importe où
ne sachant plus que tu es mon amante
tu marches au bord des vagues
tu en entends la rumeur
mais tu ne vois pas la mer
tu t' en fous bien si je pleure
tu ne vois pas la mer
la naine rouge
d' une pensée explosée
parcourt ton regard
et te fait frissonner
comme un puzzle
tu assembles des reflets
sans te soucier
de l' ordre
secret
que leur confièrent
les ondes
sensibles
tu marches au bord de la nuit
tu risques de perdre l' équilibre
de te confondre à l' ombre
que tu t' inventes
l' ombre profond inhumaine
du trop idéal soleil
que tu voudrais fixer
sans jamais des yeux
ciller tu marches au bord de la nuit
sans laisser
ma main
prendre ta main
parce qu' elle est
trop chaude
et trop forte
et trop vive
et que je ne suis pas sûr
ce soir
que tu aies jamais
voulu
franchir
le seuil
de l' espoir
fallait-il alors
me laisser t' aimer
me jeter dans ta vie
comme l' on se livre à la mort
je ne sais plus
où que tu ailles
que te suivre
et ton silence
est mon silence
moi qui voulait tant
qu' à ta musique s' accorde
ma chanson
et toi tu marches dans les rues de Mantes
comme on marche n' importe où
ne sachant plus que
tu es mon amante
il n'est poésie
que d' ignorance
mais fallait-il payer de ce prix
notre silence
ces mots
cette nuit
surgis de la nuit
absence c' est
comme
contre une tempe
le froid contact
d' un révolver
chargé
chargé de tous ces orages
qui nous ont éloignés
malentendus qui sait
à plaisir cultivés
comme orties
dans le verger d' aimer
et dire que mon corps un jour
ne sera plus que cette souche
qu' embarque dans le temps
le navire cercueil
et dire qu' il serait encore temps
que sur ta bouche adorée
je cueille
ces baisers
qui me feraient aimer
jusqu' au seuil de l' éternité
vraiment je regrette
que nous ne soyons pas morts ensemble
comme un soir
tu me l' as proposé
alors je ne savais pas
que ta tendre passion ne serait pas
la ligne d' horizon
de ma lamentable vie
comme tu avais raison
comme est lourd et lent le temps
lorsque je n' attends plus que toi
lorsque je ne t' entends pas
mes oreilles sont murées
et mes jambes trop lourdes
et toi tu marches dans les rues de Mantes
comme on marche n' importe où
ne sachant plus que
tu es mon amante
trois notes de piano
surgies d' une demeure
il me semble que je meurs
Ondine
qu' un pas de plus
c' est un pas de trop
que je ne vais nulle part
que je ne m' aime plus
si tu ne m' aimes pas
trois notes de piano
je roule dans le caniveau
comme une dérisoire
douteille à la mer
que pas même ne recueillera
le plus îvre clochard
des grands boulevards
trois notes de piano
trois neurones de mon cerveau
se déconnectent
silencieusement
je dis ton nom
au lierre d' une maison
mais c'est manquer
de raison
le lierre ne cache que
la pierre
trois notes de piano
je voudrais que brûle
ce maudit instrument
dont les touches pour tous
noires
ont pour moi le bleu
de tes yeux
silencieux
et que la musique
toute la musique
elle aussi brûle
je n' ai plus le désir
que d' un univers de cris de chocs de heurts
semblable au fracas
qui m' emplit la tête et le coeur
depuis que je n' ai plus le bonheur
de t' entendre
jouer
à moins que sans le vouloir
tu n' aies commis quelques désaccords
sur le clavier de mes espoirs
et maintenant tu marches dans les rues de Mantes
comme on marche n' importe où
ne sachant plus que
tu es mon amante
tu dors doucement dans la nuit de novembre
tandis que
pour ne pas mourir de froid
je dis ce qui doit être dit
notre légende enfin
dont les gens d' aujourd' hui
trop occupés
à construire des routes
qui ne mènent
nulle part
ne se soucieront pas
il me serait doux pourtant de penser
qu' un jeune homme
je ne sais d' où surgi
partage un instant ma souffrance
et t' aime d' être tant aimée
autant que physique
j' aurais voulu que notre amour
fût métaphysique
que nous donnent accès
nos caresses
à ces inadmissibles univers
dont ne seront convaincus
nos contemporains
qu' à l' heure de leur mort
subtiles fractions d' éternité
que seule distille
l' approche des corps aimantés
des idiots même en sont devenus
poètes ou prophètes
en d' autres temps
mais aujourd' hui l' extase
se dit malaise
angoisse
au sein de corps démagnétisés
privés de candeur
et d' aura
le monde n' est plus qu' inerte matière convenue
sur laquelle planent les inutiles prières
de ceux qui brisant les idoles
n' ont laissé sur Terre qu' une énergie folle
déconcertée de son initial projet
qu' importe
toi tu marches dans les rues de Mantes
comme on marche n' importe où
ne sachant plus que
tu es mon amante
tu es mon amante
du moins me reste ce dire
à l' exclusion de tout autre
du moins me reste dire
et que reste-t-il de l' être
sinon ce qui s' en dit
au coeur même de l' incendie
pourquoi donc s' effacerait la parole
elle n'est pas du bois
dont se trament les bûchers
mais légère comme une âme
volète au coeur des flammes
et parfois même
merveille
pénètre le coeur des femmes
je n' écris pas avec les mots de tous les jours
car tous les jours avec toi
même en pensée
ce n' est pas encore assez
je me souviens qu' enlacés
nous avons parcouru
les rues d' une ville sainte
qui jamais n' a effacé les pas de ceux
qui ont rêvé
de toujours s' aimer
les reflets s' envolent-ils des canaux
ou bien restent-ils figés
dans quelque livre d' or
qu' au jugement dernier
délivrera
le dernier doge
il est possible évidemment
de ne plus croire en rien
l' on pourra croire alors
que je ne suis plus ton amant
que je ne l' ai jamais été
sans nostalgie ni projet
je vis au présent
le regret
de ne pas entendre ta voix
de ne plus toucher ton bras
de ne plus être tout à fait moi
je me souviens d' une ville
où chaque geste est une promesse
chaque parole un serment
chaque sourire une alliance
mais toi tu marches dans les rues de Mantes
comme on marche n' importe où
ne sachant plus que
tu es mon amante
tu es mon amante